On n’a pas fait de grands projets pour l’été, car les grands projets dépendent de la météo, des horaires et de l’humeur des autres. On a fait de petits projets, comme des courses : un dîner entre amis sur la terrasse, avec une chaise réservée à celui ou celle qui a besoin de dire les choses telles qu’elles sont et une table réservée à la salade de pommes de terre. Un week-end camping avec le seul couple de la fac qu’on apprécie encore et qui ne nous demande jamais de nous justifier. Un samedi à flâner au marché, à acheter trop de pêches et à dépenser une fortune en pain, puis à se retrouver dans la cuisine, les poignets couverts de jus, et à dire : « Voilà. C’est exactement ce qu’on voulait. »
Sur mon calendrier, mi-juillet, j’ai noté au crayon « Peinture – retouches », et en dessous, plus petit : « Peut-être – vendre ? » Je sais que cette interrogation évoluera au fil de l’année. Je n’ai pas encore besoin de la réponse. J’ai les calculs. J’ai l’établi. J’ai la serrure.
Coda
Parfois, en fin d’après-midi, quand la lumière du salon semble transformer la poussière ordinaire en un parfum d’encens, je pense à mes sœurs comme on pense à une rue qu’on empruntait pour aller à l’école avant que la ville ne réorganise la circulation. Elle est toujours là. Les voitures y circulent. On peut toujours y aller si on veut. Mais il existe un meilleur itinéraire maintenant, avec moins d’arrêts et un meilleur feu pour tourner à gauche, et il permet d’arriver à destination plus sain d’esprit.
Je ne leur souhaite aucun mal. Je leur souhaite la sagesse, ce qui est une autre forme de mal. Je leur souhaite des clôtures qui les tiennent à la fois à l’intérieur et à l’extérieur. Je leur souhaite la pratique dont parlait mon père, la patience que ma femme me témoigne même quand je ne la mérite pas, et le sommeil profond et réparateur du berger de David, qui s’endort sur le porche après le passage du renard, quand le soleil brille comme une pièce de monnaie sur le plancher. Je leur souhaite un endroit où s’asseoir pendant qu’ils ferment leurs propres portes à clé.
Le jour anniversaire du barbecue – ce faux 4 juillet que nous ne rejouerons jamais –, ma femme et moi sommes allés en voiture à la périphérie de la ville, là où les vendeurs de feux d’artifice installent leurs tentes et proposent des pétards à ceux qui aiment l’idée d’une fin. Nous n’en avons pas acheté. Debout sur le capot de notre voiture, nous avons regardé le ciel des autres s’illuminer, s’éteindre, puis s’illuminer à nouveau, sans éprouver la moindre affection pour ceux qui n’étaient pas là avec nous.
De retour chez moi, j’ai vérifié une dernière fois les caméras de montagne, comme on vérifie un fourneau. Quatre images fixes sont apparues : le portail ; le porche ; la vallée ; la grange. Rien. Tout. Le renard, quelque part ; le chien, endormi ; la maison, en attente ; la serrure, prête.
J’ai éteint le téléphone et l’ai posé sur la table de nuit. Je me suis tourné vers ma femme et j’ai dit dans l’obscurité : « Tout va bien. »
Elle a dit : « Oui », et la salle a acquiescé.
Et parce que nous sommes qui nous sommes, nous avons dormi comme des gens qui n’avaient rien à terminer et tout à construire.


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